Symphonie n°3 en La mineur dite « écossaise »
Felix MENDELSSOHN-BARTHOLDY (1809-1847)
À vingt ans, Félix Mendelssohn Bartholdy entame une tournée européenne de quatre ans. En avril 1829, avec son ami poète Klingemann, il part pour l'écosse. Le pays l'émerveille tant qu'il lui inspire deux oeuvres : la fameuse Grotte de Fingal (Die Fingalshöhle), du nom de la célèbre grotte de l'île de Staffa, dans l'archipel des Hébrides, et sa future troisième symphonie, dite « écossaise », que vous entendrez ce soir.
Plus encore que la visite de l'archipel des Hébrides, la visite de Holyrood House, à Edimbourg - palais en ruine de la reine Mary Stuart, reine d'écosse et reine de France, morte tragiquement au milieu du XVIème siècle (une mort tellement romantique) - le marque profondément : « au plus profond du crépuscule, nous nous sommes rendus aujourd'hui au palais où la Reine Mary a vécu et aimé ; il y a là une petite chambre à laquelle on accède par un escalier en colimaçon [...] La chapelle qui se trouve à côté n'a plus de toit, l'herbe et le lierre y poussent en abondance et c'est devant l'autel brisé que Marie fut couronnée reine d'écosse. Tout ici est brisé, croulant et le ceil serein s'aperçoit quand on lève la tête. Je crois avoir trouvé là aujourd'hui le début de ma symphonie écossaise ».
Cependant, il fallut une longue gestation avant que les premières notes se transforment en une longue symphonie de quarante-cinq minutes. En effet, entre 1829 et 1832, les voyages du compositeur le conduisent loin de l'écosse et notamment en Italie. Toujours influencé par son environnement, il se sent presque obligé d'abandonner son écossaise pour créer une Italienne. Il écrit ainsi en mai 1831 : « Du 15 avril au 15 mai, c'est la plus belle époque de l'année en Italie ; qui donc oserait me faire un crime de ne pas pouvoir me replonger dans les brumes d'écosse ? Aussi ai-je dû laisser de côté, pour le moment, la symphonie ». Il ne revient sur sa troisième symphonie (qui est en fait la quatrième) que neuf ans plus tard, en 1841. Il publie la partition en janvier 1842, avec la dédicace à la reine Victoria et dirige lui-même la première, le 3 mars 1842, à la tête de l'Orchestre du Gewandhaus de Leipzig.
Missa in angustiis en ré mineur dite « Messe Nelson » (Hob. XII :11)
Franz Joseph HAYDN (1732-1809)
La Missa in angustiis ou Messe Nelson de Haydn est marquée, par son nom comme par son style dramatique et son mode mineur, par les angoisses créées par la guerre de la Première Coalition. Composée entre le 10 juillet 1798 et le 31 août de la même année, la troisième des six grandes messes de Haydn s'inscrit dans le contexte troublé de la campagne d'égypte et de la grande défaite française d'Aboukir en août 1798 face à la flotte britannique. En 1795, Haydn est de retour au service de la famille Esterhazy à la cour d'Eisenstadt non loin de Vienne après un bref séjour en Angleterre (1791-1795) qui avait interrompu un service vieux de plus de trente ans. Or, après les victoires napoléoniennes de 1797 - Napoléon a poussé son armée jusqu'à cinquante kilomètres de Vienne - Haydn comme l'Autriche et la famille Esterhazy craignent une victoire de la France. Néanmoins, cette messe fut composée pour l'anniversaire de la princesse Maria Hermenegild Esterhazy, épouse de Nicolas II, seule oeuvre imposée tous les ans à Haydn. Les six grandes messes qu'il compose entre 1796 et 1802, qui figurent parmi les plus grandes réussites de la musique liturgique, furent donc des commandes du prince-électeur Nicolas II. Après la Heiligmesse et la Missa in tempore belli (Messe en temps de guerre), Haydn propose le 23 septembre 1798 la Missa in angustiis, première oeuvre qu'il compose après La Création.
La messe fut exécutée pour la première fois le 23 septembre 1798 à l'église paroissiale Saint-Martin d'Eisenstadt, sans les bois et les cors que le prince-électeur avait licenciés par souci d'économie. Ils sont remplacés par un orgue concertant. La version de Breitkopf et Härtel de mai 1803 contient une partie pour bois ajoutée par l'éditeur. La version jouée ce soir comprend quatre solistes, un choeur à quatre voix mixtes, des cordes, une flûte, deux hautbois, deux bassons, trois trompettes, des timbales et un orgue concertant. L'origine de son titre (Missa in angustiis) comme de son surnom (Messe Nelson) demeure sujet à débat. Nom donné à la messe par Haydn lui-même, Missa in angustiis peut en effet signifier que la messe fut composée dans une période de temps court (en l'occurrence en un mois et demi), ou que la messe fut jouée avec peu de moyens (il n'y avait pas tous les vents) ou qu'elle fut écrite en des temps de détresse. C'est cette dernière interprétation qui est généralement retenue. Quant à l'épithète « Nelson », elle prête aussi à confusion. En effet, quelques jours avant sa première exécution, la nouvelle de la victoire de l'amiral Nelson à Aboukir parvint à Eisenstadt. On dit alors que Haydn ajouta les trompettes et timbales dans le Benedictus en l'honneur du grand amiral, ce qui pourrait être l'origine du nom de la messe. C'était néanmoins une pratique commune à l'époque que d'introduire trompettes et timbales à cet endroit de la messe. Il est donc plus vraisemblable que la Missa in angustiis tire son surnom du fait qu'elle fut jouée en l'honneur de l'amiral lors de son séjour à la cour d'Eisenstadt en septembre 1800. La tradition veut que Lord Nelson ait donné à Haydn une montre en or gagnée à Aboukir tandis qu'il lui donnait la plume ayant servi à composer une cantate pour Lady Hamilton, la plus belle femme d'Europe, qui accompagnait Nelson. L'édition de 1809 conservée aux archives municipales d'Eisenstadt atteste de l'utilisation précoce de ce titre de « Messe Nelson ». La Messe Nelson est devenue par la suite la messe la plus populaire de Haydn.
Notes de programme de concert mises à jour le vendredi 29 octobre 2010 à 15:26